Covid et évolution des pratiques RH (ressources humaines) et du marché du travail
Cela fait maintenant plus d’un an que nous cohabitons avec la COVID19.
L’an dernier, tout a été bousculé, les magasins ont fermé subitement, les salariés sont restés à domicile en télétravail, celui-ci à organiser sans préavis, en garde d’enfant (arrêt maladie au début), en chômage partiel. Les employeurs étaient occupés à essayer de comprendre comment suivre la différence entre annonces du gouvernement et décrets d’application. Les mesures ont du être déployées dans l’urgence ( sens de circulation des employés, barrières entre bureau, gestes barrières et limites de responsabilité beaucoup plus floues, distribution de masques, gestes barrière etc) et mis en place sans véritables outils. Il a fallu actualiser les Documents Uniques d’Evaluation des Risques. Et malgré tout continuer à appliquer les règles d’entreprise comme l’organisation des élections des délégués du personnel. Les comptables ont eu plus d’une nuit blanche avec les changements de règles de salaires (prime pouvoir d’achat à prolonger avec de nouveaux critères, heures défiscalisées qui évoluent) la mise en place du prélèvement à la source. Bref de quoi être bien occupés.
Les demandeurs d’emploi en fin de droit ont obtenu des prolongations de droit. Les réformes prévues ont été décalées. Les demandeurs d’emploi se sont posé la question de savoir s’il fallait chercher dans la période. Les salariés des secteurs fermés, retail, restaurant, tourisme, culture… se sont questionnés sur l’opportunité de changer de carrière. La mise en place des prolongations de droit pole emploi n’a pas suivi partout, et encore fallait-il être au courant et comprendre comment cela allait s’appliquer. Fin de droit dans un mois, dans 6 mois, les règles ne sont pas les mêmes.
Le marché de l’emploi a évolué, les offres sont publiées plus sporadiquement entre les stop and go. Dès l’annonce d’un confinement, ou de règles durcies, les publications d’offres baissent, dès l’annonce d’un calendrier de sortie, les offres repartent. Difficile de rester motivé dans ce contexte et de poursuivre sa recherche.
Les collectivités doivent assurer des services au pied levé, faire fonctionner certains établissements scolaires, les refermer dans l’urgence, mettre en place la vaccination, réorganiser les équipes.
La vie d’avant c’est sûr, on la regrette dans un tel contexte d’adaptation rapide auquel faire face !
Finalement que restera-t-il de tout cela ? Est-ce que certains paramètres sont les phases préliminaires des changements profonds ?
Oui certainement sur certains sujets :
Le télétravail :
De droit du salarié, il est passé à obligation légale de l’employeur. Les salariés y ont gouté, certains avec délectation, d’autres découvrant que c’est un cauchemar ! Le résultat, est que nous allons certainement évoluer vers un modèle équilibré avec un mix travail sur site et télétravail. La fin des bureaux, certains l’ont envisagé, mais finalement, effet boomerang oblige, on y revient. Le fait est que la créativité dans une entreprise est le résultat de cohabitation d’idées, de divergences d’opinions, de coconstruction. Dans les premiers mois du confinement on a mis à plat ce qui ne l’était pas, on a vécu sur les acquis (leads, clients) mais qu’il est clair que cela s’essouffle et qu’il va falloir relancer la machine.
Comment le mettre en place, quelles responsabilités pour l’employeur : il est mis en place par un avenant collectif ou individuel, qui cadre le sujet et notamment le rappel à la sécurité des salariés (ne pas dépasser le temps de travail habituel, le droit à la déconnexion notamment). Ce qui en ressort, est que le télétravailleur est un travailleur isolé ! et oui, sur le temps de travail comme sur le temps de trajet, le travailleur est sous la responsabilité de l’employeur, alors si le salarié est seul chez lui et qu’il a un accident la responsabilité de l’employeur peut être engagée. A cet effet, il existe des dispositifs comme les outils PTI (protection du travailleur isolé) qui peuvent être mis en place (solution logicielle ou dispositif dédié) pour protéger l’employeur. Le salarié sera-t-il obligé de s’y soumettre ? oui car c’est une responsabilité de l’employeur et qu’il peut vous l’imposer.
L’employeur pourra-t-il demander le retour au bureau, vous demander d’assister à des réunions ? oui bien sur, surtout si c’est prévu dans l’avenant. Alors avant de vous précipiter à 300 km avec famille et meubles et de déménager en rêvant de bucolisme, réfléchissez et parlez-en avec votre patron pour savoir si le télétravail sera pérenne ou pas.
Qui prend en charge les frais : c’est à la discrétion de l’employeur, mais avec un plafond et non un plancher. C’est-à-dire que l’employeur peut rembourser des frais, sans obligation, mais que l’urssaf ne reconnaitra que les frais réels liés au télétravail (donc pas toute la facture d’électricité de votre château de 500 m²). En absence de justificatif, l’Urssaf admet 10 euros par jour hebdo de télétravail, soit 10 euros par mois si vous faites une journée de télétravail par semaine.
Changements de règles pour les demandeurs d’emploi
La réforme a été décalée plusieurs fois, mais il semble que maintenant elle va réellement s’appliquer, même si le Conseil d’Etat s’en mêle et que le gouvernement module les règles en fonction du contexte particulier. Dégressivité pour les hauts salaires après 6 mois, changements de règles pour le calcul et l’ouverture des droits, la réforme s’applique par tranche.
Prévu en 2019, le premier volet devait se mettre en place : nouvelles règles d’ouvertures de droits, dégressivité pour les hauts salaires, indemnisation des travailleurs indépendants et des démissionnaires (sous conditions). C’est finalement le 1er janvier 2021 que l’on en voit l’application. Le 1er juillet, on verra l’entrée de la seconde partie, avec la réforme du mode de calcul des indemnités même si une première partie sur le mode de calcul de l’ouverture des droits est en vigueur.
Concernant la dégressivité des indemnités pour les hauts salaires, celle-ci est reportée à mars 2022 et si au départ elle devait s’appliquer après le 6ème mois, il semble que cela sera finalement après le 8ème mois.
Le conseil d’Etat a remis en cause certains calculs et certaines modalités, c’est le cas du bonus/malus pour les entreprises et du calcul des indemnités qui prennent maintenant en compte les jours travaillés et les périodes d’inactivité, celles-ci seront plafonnés dans le calcul. Ceux-ci sont donc revus.
Jusqu’à maintenant les bas salaires avaient des droits proches de leur salaire, ceci avait été mis en place pour répondre une situation réelle : les hauts salaires peuvent épargner plus que les bas salaires. Il semblerait que le calcul des droits repart sur une base plus linéaire mais qui va induire que les bas salaires auront des indemnités en baisse mais pendant plus longtemps. La question sera de savoir s’il sera possible de faire face à ses dépenses sur un bas salaire, et si l’important c’est le montant à court terme ou la durée d’indemnisation mais plus basse. Il y a fort à parier que cela sera remis en cause rapidement, surtout dans le contexte actuel.
Enfin deux nouvelles catégories de demandeurs d’emploi pourront être indemnisées : les travailleurs indépendants, mais en cas de liquidation judiciaire, et les démissionnaires sous réserve d’un projet de reconversion.
Le marché de l’emploi a-t-il été affecté ?
Oui définitivement. Tout d’abord, l’indice Indeed (joboard) nous indique une baisse de nombre d’offres d’emploi de 7%. Même si Indeed est une plateforme de référence, cela n’empêche que le réseau et le bouche à oreille sont des marchés difficiles à quantifier mais très actifs en période de crise. Mais le plus important est le déplacement vers des offres à des salaires plus bas, les employeurs pouvant se poser la question de recruter à des niveaux inférieurs compte tenu de l’absence de visibilité sur l’avenir mais aussi sur l’offre de candidatures un peu plus large. Bien sur, certains métiers qui n’utilisent pas ce type de plateforme sont en grande demande comme le secteur de la santé, alors que des industries qui les utilisent facilement sont en retrait comme le tourisme et le retail.
Un deuxième point très important concerne les aspirations des demandeurs d’emploi vers de nouvelles professions. C’est le moment de considérer un bilan de compétences ou une reconversion, certaines forcées, comme pour les pertes de postes dans le tourisme et la restauration alors que pour d’autres le chômage laisse du temps pour réfléchir à ses aspirations futures.
Concernant les postes de commerciaux par exemple, on note une très forte différence d’appréciation du marché entre demandeurs et recruteurs. Si les recruteurs n’osent pas se mouiller faute de visibilité, et de ce fait n’offrent pas de conditions attractives, les demandeurs sont eux très frustrés car les conditions offertes ne répondent pas à leurs attentes.
Faut-il continuer à chercher un emploi ? définitivement oui, tout un pan de l’économie continue à fonctionner, les entreprises ont besoin de ressources pour pallier aux absences et départs (et oui, certains continuent de se rapprocher de la retraite et donc vont partir, et d’autres l’envisagent de manière plus anticipée que prévu). Il faut aussi anticiper les questions de mobilité liées soit à des choix personnels soit pour des suivis de conjoint par exemple
En conclusion, les grands changements de 2020, restent la modification du fonctionnement du travail et la mise en place du télétravail, le changement du marché apparent de l’emploi, la réforme de pole emploi. Tous ces points bousculent autant la gestion des RH et c’est peut être le moment de réfléchir avec un expert, que la gestion de l’avenir professionnel. Je reste à votre écoute pour discuter de vos projets.